Soljenitsyne, mort d'un emblème de la dissidence

Publié le par Anne Michel

Prix Nobel de littérature en 1970, l'homme au long visage de prophète s'est éteint dimanche soir à l'âge de 89 ans à son domicile de Moscou.

Plus qu'un grand écrivain, Soljenitsyne était une légende. «Et malgré tout, il arrive qu'un cri déclenche l'avalanche…», a écrit l'homme au long visage de prophète. Son cri fut entendu dans le monde entier. Et ce cri fut la raison d'être de l'écrivain : témoigner pour les victimes du goulag et dénoncer le communisme comme le mensonge absolu.

link
Sa révolte contre la machine totalitaire, ses incessants coups de boutoir contre la «doctrine unique et vraie» ont fait de ce rescapé des camps de concentration le témoin à charge numéro un des tortionnaires soviétiques. Rien, jamais, ne l'arrêta.


Sa longue vie fut placée sous le signe des miracles. Par trois fois, en effet, il échappa à une mort donnée pour certaine. Il sortit vivant des terribles combats du front russe, pendant la Seconde Guerre mondiale, où son comportement héroïque durant le siège de Leningrad lui valut d'être promu capitaine. Puis, il résista au calvaire de plusieurs années de camp. Enfin, durant sa captivité, il fut atteint d'un cancer dont il guérit miraculeusement.


Ce sont ces épreuves que ce survivant de trois grands fléaux (la guerre, les camps et la maladie) raconte dans deux livres mondialement célèbres : Une journée d'Ivan Denissovitch et Le Pavillon des cancéreux.

Un homme brisé assigné à résidence

Mais revenons à cette condamnation qui frappe le courageux soldat de l'Armée rouge. Que lui a-t-on au juste reproché ? Tout a commencé à cause d'une lettre, écrite en 1945, dans laquelle le jeune capitaine d'artillerie laissait entendre à un ami d'enfance que Staline lui semblait s'être éloigné de l'idéal de Lénine. La police politique intercepta la lettre et arrêta Soljenitsyne, accusé d'être un «ennemi du peuple». Cette simple lettre lui valut d'être condamné à huit ans de camp pour activité contre-révolutionnaire. À l'expiration de sa peine, en 1953, c'est un homme brisé qui est assigné à «résidence à perpétuité» en Sibérie. Brisé, mais décidé, coûte que coûte à montrer le vrai visage du communisme. La brève période de détente ouverte par Khrouchtchev en 1956 lui permet d'être réhabilité et de mettre fin à l'exil. Il peut alors s'installer à Riazan, à quelques kilomètres de Moscou, où, petit professeur, il enseigne les sciences physiques dans une école secondaire. C'est à ce moment-là qu'il va faire paraître, en 1962, Une journée d'Ivan Denissovitch. Cette plongée de vingt-quatre heures dans l'enfer des camps donne une voix aux innombrables martyrs qui n'ont pas survécu, comme lui, à l'enfer du goulag.

L'écrivain sait de quoi il parle quand il décrit l'univers concentrationnaire. Rien de ce qu'il a vécu et vu durant sa captivité n'a été oublié. Contre toute attente, son livre n'est pas censuré. C'est même Khrouchtchev en personne, alors maître absolu du Kremlin, qui autorise sa publication. Grâce à cette imprudente approbation du régime, le «roman» est lu dans tout le pays. Du jour au lendemain, Soljenitsyne devient célèbre. Il est présenté comme l'un des principaux champions de l'antistalinisme. On l'encourage à publier encore divers courts récits.

Mais très vite, une nouvelle glaciation fige le système. Krouchtchev est remplacé par Brejnev. Mais Soljenitsyne n'entend faire aucune concession. En 1967, il provoque à nouveau le système en réclamant la suppression de la censure. Deux ans plus tard, il est exclu de l'Union des écrivains d'URSS. Le prix Nobel couronne l'écrivain le 8 octobre 1970, ce qui met dans l'embarras les autorités soviétiques. Brejnev fait tout ce qu'il peut pour empêcher l'écrivain de se rendre à Stockholm. Pour ne pas en rajouter dans la provocation, et par crainte de représailles sur sa femme et ses trois enfants, Soljenitsyne préfère jeter l'éponge. Il n'ira pas chercher sa récompense en Suède. Mais rien, en revanche, ne semble pouvoir faire dévier l'écrivain de la route qu'il s'est tracée : témoigner, pour son peuple, pour son pays, faire connaître au monde entier le système oppressif sur lequel repose l'URSS. Et ce, quel que soit le prix à payer.

En 1973, L'Archipel du Goulag déclenche à nouveau les hostilités avec le Kremlin. Le KGB a en effet mis la main, à Leningrad, sur un exemplaire du roman. L'amie à qui l'écrivain avait confié son manuscrit est arrêtée et interrogée plusieurs jours. Elle est finalement retrouvée pendue. Lorsqu'il apprend la nouvelle, Soljenitsyne n'hésite pas à déclarer ouvertement la guerre au régime.

Par des voies mystérieuses, il parvient à faire passer une copie de son manuscrit de l'autre côté du rideau de fer… Une édition russe paraît à Paris dans les derniers jours de 1973. Les autorités russes ne réagissent pas aussitôt. Mais, le 12 février 1974, l'écrivain est arrêté à son domicile, déchu de sa nationalité et expulsé. Il s'agit du premier citoyen soviétique expulsé depuis Léon Trotski. Le lendemain, un avion spécial de l'Aeroflot le conduit à Francfort. Quelques semaines plus tard, sa femme et ses trois enfants le retrouveront. Plus encore que le Nobel, la condamnation à l'exil en Occident met le nom de Soljenitsyne à la une de tous les journaux du monde. Et son nouveau livre, L'Archipel du Goulag, est un véritable coup de tonnerre qui oblige les Occidentaux à se réveiller, à regarder en face la réalité soviétique.

Commence alors pour Soljenitsyne, à cinquante-cinq ans, une nouvelle période d'exil. Il s'installe d'abord à Zurich, en Suisse, puis émigre en 1976 aux États-Unis. Il va s'isoler dans sa propriété de Cavendish, aux nord-est des États-Unis, au cœur d'une vaste forêt de l'État du Vermont.

À la télévision, les Français découvrent en 1983 l'ermite du Vermont grâce à une émission mémorable d'«Apostrophes». L'écrivain accepte de montrer aux Français un peu de sa vie et de son âme. On le découvre entouré de sa femme Natalia et de ses trois fils. On visite sa maison, son immense bureau.

Ses dernière années sont consacrées au travail

Aux États-Unis, sa voix peu complaisante sur le mode de vie matérialiste du monde occidental («un bazar commercial») ne fait pas l'unanimité, loin s'en faut. Si le Sénat américain le nomme citoyen d'honneur, ses positions radicales déplaisent à beaucoup d'intellectuels. On lui reproche de ne rien comprendre à la démocratie.

Les dernières années de sa vie sont vouées au travail. Soljenitsyne reprend toutes ses œuvres déjà publiées afin d'aboutir à une version définitive de chacune. En 1990, paraît Comment réaménager notre Russie ?, essai dans lequel il défend l'idée d'une Union soviétique plus petite, plus russe, d'un retour aux valeurs familiales, traditionnelles, après un long cauchemar. Ce texte provoque un débat. Certains l'accusent d'être rétrograde et de vouloir éloigner l'URSS de l'Europe. Trois ans plus tard, il accepte de parrainer, à l'invitation de Philippe de Villiers, les manifestations du bicentenaire des massacres de Vendée. Il y prononce un vibrant hommage aux insurgés vendéens de 1793. Leur combat est comparé à celui des paysans russes contre les bolchéviques. «Toute révolution déchaîne les instincts de la plus élémentaire barbarie», déclare-t-il devant une foule enthousiaste.

Il restera vingt ans dans le Vermont, vingt années au cours desquelles l'Empire rouge va se fissurer puis s'écrouler. Celui qui avait affirmé «Je rentrerai vivant dans mon pays, je le sais  » retrouve enfin le sol natal en 1994, quatre ans après avoir été officiellement réhabilité par Gorbatchev. Les conditions de son retour ont été longuement et minutieusement négociées, parfois même avec Boris Eltsine en personne.

Isolé dans sa datcha située à moins d'une demi-heure de Moscou, dans une zone de luxueuses résidences de l'ancienne nomenklatura, Alexandre Soljenitsyne rédige ses souvenirs d'exil en Europe et aux États-Unis. Il se sent de moins en moins romancier et de plus en plus historien. Jusqu'en 1998, il conserve une activité sociale intense, se montre souvent à la télévision où il a sa propre émission, rencontre de nombreux écrivains et historiens. Seule la maladie a pu interrompre, à la toute fin de sa vie, les activités d'un des plus grands résistants de tous les temps. Celui qui, tout seul, ébranla l'empire soviétique.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
A
Bonsoir Pierre,<br /> <br /> Effectivement, nous perdons une grande personnalité mais je suis comme Erebus et je préfère le Soljenitsyne d'avant 1994.<br /> <br /> Jacques CHIRAC a estimé que «La Russie perd aujourd'hui un grand combattant pour la vérité qui aura oeuvré à la réconciliation des Russes avec leur passé», «Le monde perd quant à lui une figure de la liberté».<br /> <br /> Nicolas SARKOZY a déclaré que «Alexandre Soljenitsyne a été l'une des plus grandes consciences de la Russie du XXe siècle. Né un an après la révolution russe, il a, pendant les très longues années de la terreur soviétique, incarné la ‘dissidence'», a déclaré Nicolas Sarkozy dans un communiqué diffusé par l'Elysée. «Refusant de quitter son pays pour mieux dénoncer les agissements du pouvoir, il fait paraître au péril de sa vie ‘Le Pavillon des cancéreux' puis ‘L'Archipel du goulag', qui sont autant d'actes de résistance à l'oppression. C'est Alexandre Soljenitsyne qui ouvre les yeux du monde sur la réalité du système soviétique, en conférant à son expérience une portée universelle.» «Son intransigeance, son idéal et sa vie longue et mouvementée, font d'Alexandre Soljenitsyne une figure romanesque, héritière de Dostoïevski. Il appartient au Panthéon de la littérature mondiale. Je rends hommage à sa mémoire»<br /> <br /> Au revoir Monsieur SOLJENITSYNE.<br /> <br /> <br /> Anne MICHEL<br /> Conseillère Municipale Opposition
Répondre
P
la liberte est en deuil,c'etait le plus grand,une immense tristesse m'accable c'est la perte d'un pere,d'une consience d'une memoire,il etait avec JEAN-PAUL 2 LE PRINCIPAL ARTISAN de la debacle de la racaille communiste<br /> d'europe de l'est et de la russie,il reste maintenant a poursuivre son oeuvre et a eradiquer<br /> pour toujours cette nauseabonde ideologie.<br /> Son oeuvre m'a accompagnee tout au long de ma vie,donnez du courage quant il me manquait,de l'espoir quant la vie paraissait sans issue,<br /> fabuleux destin d'un resistant,je le croyait immortel sa plume trempee dans l'encre d'une russie massacree par la revolution d'octobre et son ame arrachee a elle meme,despiritualisee<br /> empoisonnee,fletrie mais toujours renaissante.<br /> Bien sur il y a l'archipel du goulag qui est la reference absolue sur la faillite politique et la catastrophe humaine representee par le communisme et l'horreur du systeme concentrationaire stalinien;le pavillon des cancereux et une journee d'ivan denisovich qui resteront les temoins de cette siniste ideologie.<br /> Mais pour moi LA ROUE ROUGE qui retrace en 6 tomes<br /> de AOUT 14 a MARS 17 ces moments les plus importants de l'histoire moderne ou TOUT a basculer il avait compris le premier l'importance de ces evenements admirablement<br /> racontes,la fin de la famille imperiale,la resistance de l'armme russe, l'ombre du diable qui se profile sur cette russie,et ces petits rien qui font les revolutions aux consequences funestes c'etait mes livres preferes,ce fils de paysan etait exeptionnel,unique,<br /> mes yeux pleurent d'une tristesse sans fin,il avait encore tant a faire,son passage a apostrophe et le reportage chez lui au vermont <br /> c'est comme si c'etait hier,il etait la consience du monde et un temoin direct du passage du demon sur terre,je vous rend hommage mr SOLJENITSYNE et merci pour tout,<br /> ce jour est maudit. QUE DIEU VOUS GARDE.<br /> P.G.
Répondre
A
Salut Erebus,<br /> <br /> La belle famille du côté de mon frère est russe et j'ai donc lu également les livres des auteurs russes les plus célèbres.<br /> Je me suis également rendue en Russie et cette lecture m'a permise de mieux m'imprégner de ce magnifique pays.<br /> <br /> Pour revenir au sujet de cet article, je voudrais comparer la vision de différents auteurs dissidents.<br /> <br /> Comme Tolstoï en Russie, comme Voltaire ou Hugo en France il appartient aux lutteurs, aux "dissidents", incarnant le refus de la société injuste dans laquelle ils vivaient, une résistance au nom de quelque chose d'imprescriptible. Tolstoï refusait la société d'Ancien Régime, fondée sur l'inégalité et voyait dans le moujik méprisé l'incarnation d'une vie accordée à Dieu. Soljenitsyne incarna le refus du communisme, athée et totalitaire. Tolstoï dans Qu'est-ce que l'art ? subordonnait l'art à l'action, Soljenitsyne, dans son discours du Nobel, subordonne l'art à la triade platonicienne du Vrai, du Bon et du Beau. Ni l'un ni l'autre ne comprennent "l'art pour l'art" : "J'avais affronté leur idéologie, mais en marchant contre eux, c'était ma propre tête que je portais sous le bras", écrit Soljenitsyne dans Le Chêne et le Veau, en 1967.<br /> <br /> Comparer Tolstoï et Soljenitsyne donne la mesure de la distance entre les deux siècles qu'ils marquèrent : Tolstoï dissident continue d'habiter sa gentilhommière, il publie en Russie la version expurgée de Résurrection, et à Londres la version non censurée. Soljenitsyne écrit L'Archipel du goulag dans une cahute au fond de la forêt, planque le manuscrit en différentes cachettes ; fait publier le livre à Paris sans jamais avoir vu le texte intégral… D'ailleurs, si l'épopée historique de Soljenitsyne, La Roue rouge (1971-1991), fait penser à Guerre et Paix, on y remarque avant tout la polémique avec Tolstoï. Celui-ci apparaît dans le premier "nœud", comme un sage vieillard auquel le jeune héros encore lycéen, Sania Lajenitsyne, qui est un peu le père de l'écrivain, rend visite à Yasnaïa Poliana pour lui poser la question "Pourquoi vivons-nous ?" La réponse est : "Pour aimer !" "Oui, mais il n'y a pas que de la bienveillance sur terre", rétorque le lycéen. "Le vieillard eut un profond soupir. C'est parce que les explications qu'on donne sont mauvaises, impénétrables, maladroites. Il faut expliquer avec patience. Et on sera compris. Tous les hommes naissent doués de raison" (août 1914).<br /> <br /> A ce rousseauisme foncier de Tolstoï, le roman de Soljenitsyne répond que l'homme se choisit librement bon ou mauvais. Ce que dit à sa façon un des proverbes qui ponctuent La Roue rouge comme les strophes du chœur dans la tragédie grecque : "Le mot de l'énigme est bref, mais il contient sept verstes de vérité." Soljenitsyne croit à l'action individuelle, même contre le monstre totalitaire. Il croit à la volonté de l'homme, à son choix personnel entre le bien et le mal, à ce qu'il appelle "l'ordre intérieur". L'axiologie domine toute son œuvre, et elle commande au style, au genre, à la tactique. Tolstoï voulait un christianisme rationnel, un personnage de Soljenitsyne, l'Astrologue, (comme le Védéniapine du Docteur Jivago inspiré par le philosophe Fiodorov), démontre aux jeunes gens venus le consulter que le christianisme est absolument déraisonnable, parce qu'il place la justice au-dessus de tout calcul terrestre.<br /> <br /> Au cœur de cette œuvre, une mission : "Je n'ai pas accès aux bibliothèques publiques, dit Gleb Nerjine, les archives me seront sans doute fermées jusqu'à ma mort. Mais je trouverai bien dans la taïga une écorce de pin ou de bouleau. Mon privilège, nul espion ne me l'ôtera : le cataclysme que j'ai éprouvé dans ma personne, et vu chez les autres, peut me souffler pas mal de trouvailles sur l'histoire." Les chartes sur écorce de bouleau des fouilles de Novgorod permettent de reconstituer l'histoire quotidienne d'avant les Mongols. Au "pays du mensonge triomphant" dont parle Ante Ciliga, Soljenitsyne ambitionne, dans la clandestinité, de reconstituer sur ses fiches l'histoire vraie de l'esclavagisme soviétique.<br /> <br /> Son œuvre se divise en deux grandes cathédrales d'écriture. La première, ce sont les écrits du goulag, centrés sur la condition humaine dans la "petite zone" du camp ou dans la "grande zone" de la société totalitaire. La seconde est centrée sur l'histoire de la Russie d'avant le désastre, d'avant 1917, et elle forme un ensemble de plus de 6 600 pages, intitulé La Roue rouge et sous-titré "Récit en segments de durée". Pratiquement tous les écrits de Soljenitsyne s'inscrivent soit dans l'une, soit dans l'autre de ces massifs. Une autre particularité de l'œuvre est la structure très ramassée dans le temps, l'économie spartiate des ornements, la réduction de l'action à des instants décisifs, que le physicien Soljenitsyne baptise "nœuds". Pas de mûrissement dans la durée, pas de lente "éducation sentimentale", pas de "temps retrouvé" mais des destins happés à l'instant où l'homme révèle son essence dans un tout ou rien qui fait penser à la philosophie existentialiste de Sartre. Au demeurant le "chronotope" favori de Soljenitsyne ressemble à un "Huis clos" : cellule de prison ou chambrée d'hôpital.<br /> <br /> Mais au-delà de l'espace carcéral, il y a chez Soljenitsyne le cosmos, l'échappée vers la création infinie de Dieu. Et la seule comparaison qui rende vraiment compte de cette poétique de l'enfermement et de l'échappée, c'est La Vie de l'archiprêtre Avvakoum, le grand résistant religieux du XVIIe siècle, brûlé vif à Poustozersk après avoir été confiné dans une fosse de glace. Le dialogue de Soljenitsyne avec le Créateur, dans Le Chêne et le Veau, fait souvent penser à la Vie d'Avvakoum.<br /> <br /> L'autarcie morale est une règle que Soljenitsyne a empruntée aux stoïciens, méditée au camp. Les règles qu'observe Ivan Denissovitch sont la traduction en langage bagnard de la philosophie de Marc-Aurèle : sois toi-même, ne dépends pas des autres. "Le vrai goût de la vie, on ne le trouve pas dans les grandes choses, mais dans les petites" (La Main droite). Dans L'Archipel est célébrée la prison, un lieu de redécouverte du cosmos par le reclus.<br /> <br /> Anne
Répondre
E
Il y aurait tant à dire sur Soljénitsyne, j’ai lu il y a fort longtemps son livre l’archipel du goulag et plutôt qu’un livre je devrais dire son encyclopédie, tout est classé répertorié, des faits rien que des faits pas de place à l’émotion. Il y raconte la crainte, les arrestations, les parents qui pleurent, l’indifférence feinte des voisins, les angoisses de ceux qui sont encore pour un temps libres, la vie de ceux pour qui le mot liberté n’a plus de sens. Il raconte la maladie et la ration des détenus, les femmes et les enfants dans le camp, et la mort partout présente et qui n’étonne plus personne. Dans ce livre Alexandre Soljénitsyne nous dépeint une sorte de monde sans issue, une société parallèle que presque tout le monde connaît mais que personne ne souhaite remarquer de peur de s’y faire engloutir. Je disais au début « pas de place à l’émotion » et c’est ça Soljénitsyne, du moins dans ce livre, l’émotion ne se trouve pas dans les lignes mais dans la tête du lecteur qui assiste impuissant aux horreurs communistes.<br /> Cela dit, pour ce que j’en connais, je préfère le Soljénitsyne d’avant 1994 à celui qu’il était ensuite et je retiens cette phrase de Georges Nivat qui dit ceci : « l’ entêtement de lutteur d’Alexandre Soljénitsyne fait de lui la plus grande voix du XXe siècle russe et européen, que l'on ajoute "hélas" ou pas ».<br /> <br /> <br /> Erebus
Répondre